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03/07/2025
Les psycho traumatismes revêtent plusieurs formes. Se distinguent deux formes principales : les traumatismes développementaux chroniques présents sur une longue durée pendant le développement de l’enfant et les traumatismes de choc, résultant d’un événement isolé. Ces deux formes peuvent aussi être concomitantes. Nous nous intéressons aux psycho traumatismes développementaux issus du lien entre parents et enfants et aux conditions dans lesquels un enfant a été élevé. Nous retrouvons dans les facteurs délétères, des maltraitances par excès, comme les violences physiques et sexuelles, les violences verbales et les violences psychologiques, et des maltraitances par défaut, comme la négligence émotionnelle, l’absence de soins, un manque de stimulation.
Ces traumatismes relationnels génèrent un stress chronique et la production de cortisol d’une manière prolongée, altérant impactant les structures cérébrales et le fonctionnement interpersonnel.
Intéressons-nous plus précisément aux violences verbales et aux conséquences dans le fonctionnement. L’enfant peut être témoin de violences verbales répétées ou subir lui-même des violences verbales. Dans ces deux cas de figures, il peut être soumis à des propos humiliants, dévalorisants et dénigrants, à des pressions psychologiques, à des tentatives de contrôle et de coercition, à des propos teintés d’ambivalence.
Ces violences verbales pendant l'enfance peuvent avoir des impacts profonds et durables sur le développement émotionnel, corporel, psychologique, intellectuel et social de l'enfant et plus tard de l’adulte. Nous observons alors:
- Une estime de soi diminuée : les paroles blessantes ou dévalorisantes peuvent entraîner un manque de confiance en soi et une faible estime de soi et une autodépréciation.
- Des troubles émotionnels : l'enfant peut développer de l'anxiété, de la dépression, ou d’autres troubles émotionnels. Il peut également avoir du mal à gérer ses émotions, ce qui peut se traduire par des réactions excessives ou un repli sur soi.
- Un déficit cognitif et des problèmes scolaires : le stress et le mal-être peuvent nuire à la concentration et aux performances scolaires. L'enfant peut également développer une peur de l'échec ou une aversion pour les environnements éducatifs.
- Des comportements agressifs ou repli sur soi : l'enfant peut rencontrer des difficultés relationnelles et réagir par de l'agressivité et des comportements anti-sociaux (Vissing, 1991) ou par un isolement social.
-Un impact sur le développement physique. Les violences verbales peuvent provoquer un stress prolongé, qui affecte le système immunitaire et peut ralentir la croissance et le développement physique. L'anxiété et la peur liées aux violences verbales peuvent entraîner des troubles du sommeil, essentiels pour la croissance et la récupération physique. Le stress émotionnel peut se manifester par des douleurs physiques, des maux de tête, des troubles digestifs ou d'autres symptômes somatiques. Le stress et le mal-être peuvent affecter la prise de poids, la taille et le développement moteur chez certains enfants. À long terme, les enfants victimes de violences verbales peuvent adopter des comportements nocifs pour leur santé (mauvaise alimentation, consommation de substances, etc.).
- Des impact à long terme : ces effets peuvent persister à l'âge adulte, influençant la santé mentale et globale, les relations personnelles et professionnelles. L’intériorisation de messages négatifs amène à un processus construisant une représentation négative de soi. Les critiques répétées deviennent des croyances vis-à-vis de soi-même limitantes, avec une perception de soi comme défectueuse ou indigne.
Si nous regardons plus précisément l’impact neurologiques des violences verbales, nous observons un effet sur les structures cérébrales.
La maltraitance infantile majore la formation de filet péri neuronaux (PNNs). Leur rôle est crucial pour le fonctionnement et la plasticité cérébrale. Les PNNs renforcent les synapses matures en "figeant" les connexions entre neurones, limitant ainsi la plasticité excessive. Cependant lors de traumatismes répétés, ils sont plus denses et ont tendance à figer les réseaux associés à la mémoire traumatique (Fiani G. et al., 2018).
Plusieurs zones du cerveau sont touchées lors de violences verbales. Celles-ci engendrent un affaiblissement des connexions entre les “zones impliquées dans la compréhension et la production de la parole perdure sous forme de difficulté verbale à l'âge adulte” (Delbrouck M., p.158, 2024), notamment le faisceau arqué (ou faisceau arqué longitudinal), ensemble de fibres nerveuses impliquées dans la communication entre différentes régions cérébrales, en particulier celles liées au langage, à la cognition sociale et à la régulation émotionnelle.
Les études en neurosciences et psychologie montrent que les violences verbales répétées (insulte, menaces, dévalorisations) peuvent :
Le faisceau arqué est un pont essentiel pour le langage. Les violences verbales peuvent le perturber tout en ayant des répercussions neurobiologiques et psychologiques profonde, avec des difficultés d'expression, de répétition, de compréhension, d'aphasie. Le lien entre les aires de production (Broca.) du langage et de compréhension du langage (Wernicke) sont perturbés.
Le repérage précoce des comportements et des symptômes associés à de la violence verbale est une première clé de la résilience. La neuroplasticité du cerveau est importante lors de périodes sensibles au cours du développement, notamment au moment de l'adolescence. L'accompagnement thérapeutique axé sur la construction d'une alliance thérapeutique bienveillante et sécurisante, le traitement du psycho traumatisme, et le recouvrement des capacités verbales permettra la modification des introjections négatives, le recouvrement d'une estime de soi équilibrée, une capacité à recevoir les critiques, en restant stable, une capacité à poser des limites claires.
Bibliographie
Delbrouck M., (2025). Communication, intersubjectivité et relation thérapeutique. Deboeck
Giulia Faini, Andrea Aguirre, Silvia Landi, Didi Lamers, Tommaso Pizzorusso, Gian Michele Ratto, Charlotte Deleuze, Alberto Bacci (2018) Perineuronal nets control visual input via thalamic recruitment of cortical PV interneurons eLife 7:e41520
Teicher MH, Samson JA, Sheu YS, Polcari A, McGreenery CE. Hurtful words: association of exposure to peer verbal abuse with elevated psychiatric symptom scores and corpus callosum abnormalities. Am J Psychiatry. 2010 Dec;167(12):1464-71
Vissing, YM, Straus, MA, Gelles, RJ, et Harrop, JW (1991). Agression verbale des parents et problèmes psychosociaux des enfants. Child Abuse & Neglect, 15 (3), 223–238.
22/05/2025
Considérée comme une maladie auto-immune, la polyarthrite rhumatoïde (PR) est évolutive et impacte la vie des patients. Dans le parcours de soin, il est intéressant de prendre également en compte les facteurs psychologiques. Le lien entre la polyarthrite rhumatoïde et les psycho-traumatismes est de plus en plus étudié, notamment dans le cadre des approches biopsychosociales des maladies auto-immunes.
La PR touche entre 0,5 et 1 % de la population adulte. Elle se manifeste au début par une inflammation de la membrane synoviale, puis par un enraidissement douloureux et le gonflement de plusieurs articulations, généralement au niveau des poignets, des mains et des doigts. Cet enraidissement apparaît surtout le matin, celui-ci cède petit à petit au lever. Par la suite, l’évolution prend la forme de poussée, entrecoupées de phases de rémissions. Toutes les articulations peuvent être touchées (coudes, épaules, cou, pieds et orteils, genoux, hanches), qui mènent à la dégradation des os, des tendons et des cartilages. Après plusieurs années, l’évolution de la PR provoque des déformations articulaires et des destructions des tendons. Le recours à la chirurgie orthopédique permet de réparer, avec l’emploi parfois de prothèses.
Plusieurs facteurs sont présents dans l'apparition de la maladie : des facteurs génétiques (parent atteint de la maladie) et des facteurs environnementaux (tabagisme, pollution atmosphérique, l’obésité, un faible taux de vitamine D et l’utilisation de contraceptifs oraux). De plus, des études ont mis en évidence le lien entre maladie auto-immune et stress post traumatique. Notamment une étude suédoise qui relève une association marquée (Song H , Fang F , Tomasson G, et al., 2018).
Le stress et l’exposition à des événements stressants uniques ou chroniques provoquent une réaction physiologique, due à l’activation du système nerveux autonome (SNA). Les premiers travaux des chercheurs ont permis de spécifier le lien entre le SNA et les maladies auto-immunes.
Heinroth, interniste et psychiatre allemand introduit le concept de "somatopsychique", en 1818, et l’applique aux maladies où le facteur corporel modifie l’état psychique. Puis le psychiatre américain Franz Alexander et ses collègues de l’École de Chicago (1952), présentent un modèle où conflits spécifiques et modifications physiologiques apparentes sont liés. Ils déterminent deux types de maladies psychosomatiques : les unes seraient l’expression de tendances hostiles agressives inhibées, et les autres seraient l’expression de la recherche de la dépendance et de la sécurité auprès de figures protectrices (père, mère, adultes tiers, institutions...). On y retrouve notamment l’arthrite rhumatismale.
Par la suite les travaux d’Hanz Selye a mis en évidence le syndrome d’adaptation au stress et un modèle de réponse somatique aux événements de vie. Il existe une relation entre des réponses psychiques comme la dépression, l’angoisse, des difficultés cognitives, et des réponses somatiques via des circuits neuronaux, notamment l’axe adrénergique ou sympathique, l’axe anté-hypophyse ACTH-glucocorticoïde et l’hormone somatotrope STH-minéralo-corticoïde. D’autres axes, agissant en interrelation sur l’immunité, ont été découverts depuis : le système SAM-sympathique-adrénalo-médullaire, le système HPAC hypothalamo-pituitaire-adrénocorticol et le système EO-endogène opioïde.
Le schéma simplifié de la réponse à l’agent stresseur (ci-dessous) met en lien l’enchainement de la réponse physiologique. Le stress chronique lié à un traumatisme agit sur l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HSS), et engendre une réaction du système immunitaire particulière (diminution de l'activité des lymphocytes T régulateurs, augmentation des molécules pro-inflammatoires de la famille de cytokines). Cette réaction favorise l’inflammation et le déclenchement de la PR (Katrinli, 2022).
Trauma psychologique
(abus, deuil, violence...)
↓
Activation de l’axe du stress (HHS)
→ Cortisol déséquilibré
→ Activation sympathique chronique
↓
Perturbation immunitaire
→ Augmentation des cytokines pro-inflammatoires
(IL-6, TNF-α...)
→ Diminution de l’activité des lymphocytes T régulateurs
↓
Polyarthrite rhumatoïde (PR)
↓
Douleurs + fatigue + invalidité
↓
Retentissement psychologique secondaire
(anxiété, dépression, stress chronique)
On voit là l’importance du maintien de l’homéostasie et des systèmes qui y concourt lorsqu’il y a un déséquilibre. Les émotions sont aussi une manifestation des déséquilibres. Antonio Damasio s’est penché sur ce thème et par la suite Stanislas Dehaene souligne l’interrelation entre le biologique et le psychologique.
Les patients souffrant de PR ayant un antécédent de traumatisme psychologique présentent souvent une perception plus intense de la douleur, une fatigue plus marquée, et une qualité de vie réduite. Le traumatisme module la réponse inflammatoire et pourrait aggraver l’évolution de la maladie. La prise en charge psychologique (psychothérapie, relaxation, gestion émotionnelle, EMDR, thérapies humanistes, comportementales) est à associer au traitement médical classique (Grekhov, 202). La gestion des émotions en agissant sur le stress perçu permet d’augmenter la régulation émotionnelle, grâce au lien thérapeutique et à l’intersubjectivité Des interventions comportementales, comme le yoga et la pleine conscience, sont associées à une diminution de l'inflammation. On voit donc l’importance d’une prise en charge multimodale. Des études sont encore en cours pour comprendre pleinement le mécanisme d'action thérapeutique, l'efficacité et les éventuels effets secondaires des traitements anti-inflammatoires.
Bibliographie/Sitographie
Polyarthrite rhumatoïde. Une maladie modèle pour la recherche sur l’inflammation chronique https://www.inserm.fr/dossier/polyarthrite-rhumatoide/
Le rôle du système immunitaire dans le trouble de stress post-traumatique Breton S. (2021). Une approche psychosomatique des maladies rhumatismales. Le rhumatologue n°19.
Damasio A., L'erreur de Descartes : La raison des émotions, Paris, Odile Jacob, 1995. Et, Spinoza avait raison. Joie et tristesse, le cerveau des émotions, Paris, Odile Jacob, 2003
Dehaene S., « Vers une science de la vie mentale », Leçon inaugurale présentée le 26 Avril 2006 au Collège de France.
Grekhov RA, Suleimanova GP, Trofimenko AS, Shilova LN. Psychosomatic Features, Compliance and Complementary Therapies in Rheumatoid Arthritis. Curr Rheumatol Rev. 2020;16(3):215-223.
Katrinli, S., Oliveira, NCS, Felger, JC et al. Le rôle du système immunitaire dans le syndrome de stress post-traumatique. Transl Psychiatry 12 , 313 (2022). https://www.nature.com/articles/s41398-022-02094-7
Piché R. (1993) stress psychologique et immunité cellulaire impact du diagnostic d'une masse suspecte au sein
Song H, Fang F, Tomasson G, et al. Association des troubles liés au stress avec les maladies auto-immunes ultérieures. JAMA. 2018 ; 319(23) : 2388–2400. https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2685155
30/06/2024
Les métiers du soin apportent un sentiment d’efficacité et la satisfaction de venir en aide à autrui.
Apporter de l’aide à autrui implique de réguler temporairement et consciemment sa propre subjectivité pour se mettre à la place de l’autre, sans perdre son identité. Cette compétence passe par un partage affectif. Elle engendre une résonnance motrice passant par le système des neurones miroirs, et implique l’état du corps, les réactions viscérales, puis les émotions. Elle permet au professionnel de se représenter le vécu de son patient.
L’enjeu est de se mettre à la place de l’autre sans perdre son identité, acquis au sein d’une relation d’attachement suffisamment sécure. Cependant des phénomènes de contamination peuvent interférer et empêcher la bonne distance, qui a un rôle protecteur.
La santé du professionnel du soin peut se trouver alors altérée, d’autant plus que la répétition de stress chronique augmente. S’en suit une fatigue compassionnelle, qui n’est pas liée uniquement à l’activité professionnelle, mais indique plutôt à un débordement du professionnel et à un épuisement face à la souffrance d’autrui. Cette fatigue n’est pas toujours liée avec une histoire traumatique de la personne aidée. Ce phénomène peut prendre différents aspects symptomatologiques et est à différencier du burnout, du traumatisme vicariant ou de la dépression. C’est un “processus continu, long et silencieux d’érosion psychologique qui résulte d’une exposition prolongée à des agents stressants parfois mineurs qui n’émettent aucun signal d’alarme” (Grebot, 2009).
Lorsque cette fatigue compassionnelle prend une ampleur plus importante, on arrive au burn-out avec un syndrome d’épuisement professionnel, de la dépersonnalisation et une réduction de l’accomplissement personnel. On peut parler d’un processus de désillusion où le professionnel passe de l’enthousiasme à la stagnation, à la frustration et à l’apathie. L’idéalisme déçu du professionnel de santé engagé dans son métier amène une désillusion résultant d’un décalage entre la réalité professionnelle et les caractéristiques de la personne.
Chez les professionnels accompagnants les personnes ayant subies des traumatismes se manifeste une autre forme de fatigue, dû au traumatisme vicariant. Il a été relevé que l’empathie semble être fondamentale dans le mécanisme pouvant amener un traumatisme vicariant (Bouvier et Dellucci, 2017). Un traumatisme vicariant peut donc se manifester entre autres par des symptômes intrusifs tels que des flashbacks, des cauchemars et des pensées obsessionnelles, des comportements d’évitement, des sentiments de détresse, une altération du fonctionnement global.
Pour pallier l’épuisement professionnel, des mesures de préventions primaires existent touchant à divers domaines de la santé (gérer son corps et ses affects, gérer sa pensée (philosophie de vie, doute), gérer sa vie privée et sa vie professionnelle), (Delbrouck, 2021).
Dans l’outillage du professionnel, un espace de supervision, ou d’intervision permet d’avoir un lieu bienveillant et neutre lui offrant la possibilité de se remettre en question en toute sécurité et d’avancer dans le confort d’être accompagné et conseillé (Delbrouck, 2021). Prendre également soin de son corps (au niveau médical, activité physique) et de ses émotions contribue à trouver un équilibre entre temps de soin, de ressourcement, de relations affectives, familiales et amicales. L’équilibre est à trouver aussi au niveau professionnel (horaires, missions, relations avec les collègues, temps de récupération, formation).
La notion d’interrelation apparaît alors primordiale. Le lien et donc le soin apporté au patient dépend du professionnalisme du soignant et aussi de ses capacités et ressources à prendre soins de sa santé dans un réseau d’accompagnement et de lien dans les différents aspects de sa vie.
Bouvier, G. & Dellucci, H. (2017). Chapitre 25. Les traumatismes vicariants. Dans : , C. Tarquinio, M. Brennsthul, H. Dellucci, M. Iracane-Coste, J. Rydberg, M. Silvestre & E. Zimmermann (Dir), Pratique de la psychothérapie EMDR (pp. 269-278). Paris: Dunod.
Delbrouck, M. (2021). Comment traiter le burn-out: Syndrome d'épuisement professionnel, stress chronique et traumatisme psychique. De Boeck Supérieur.
Grebot, É. (2019). Chapitre 3. Le burnout : du processus d’épuisement au syndrome d’épuisement professionnel. Dans : , É. Grebot, Les pathologies au travail: Stress, burnout, workaholisme et harcèlement. Approche intégrative (pp. 111-182). Paris: Dunod.
19/05/2024
La République démocratique du Congo, est très tristement célèbre pour les violences infligées aux femmes, le viol étant utilisé comme arme de guerre. Si la prise en charge médicale nécessite des soins somatique, l'art thérapie apporte également des bienfaits sur le chemin de la résilience pour ces femmes (Femmes violées en RDC: reconstruire les corps et les esprits grâce à l’art-thérapie. Emission de France Culture). Depuis plus de vingt ans, à l'hôpital de Panzi, le docteur Denis Mukwege, chirurgien gynécologue, travaille à la reconstruction chirurgicale des femmes victimes de violences sexuelles. Ces femmes bénéficient également d’un suivi psychologique, socio-économique et judiciaire.
Cynthia Fleury, à la tête de la chaire "humanités et santé", soutient la prise en charge par l’art-thérapie. La danse dans la prise en charge du stress post traumatique permet de sortir progressivement de l'état de sidération. Par le mouvement au travers de danses libres, là où les mots n'étaient pas possibles dans un premier temps, la parole se libère progressivement et les demandes de rapprochement et d'échange se font jour. Il a également été observé un attachement qui se recrée entre les femmes et dans la relation mère-enfant. La danse, plus que tout art, apparaît comme facilitatrice de recréation de lien. Dans le stress post-traumatique, il y a rupture de lien, phénomène de dissociation et rupture relationnelle. La danse, médiateur artistique, permet la reconnexion à soi et des différentes parties (corps, émotions, pensées), la reconnexion aux autres par le partage et ouvre à nouveau le sens de la vie. Le mouvement collectif soutenu par la musique et le thérapeute est thérapeutique.
La danse fait partie des invariants que l’on retrouve dans toutes les cultures du monde, aux côtés de la musique. Les recherches anthropologiques et archéologiques en attestent, avec des découvertes remontant à -40000ans (Garfinkel, 2020). Elle aurait permis d’établir un lien avec la nature et les événements inexplicables, dans une forme de communication par le corps. Ces pratiques semblaient incluses dans le fonctionnement social et ordonnaient, organisaient et régulaient le groupe à travers des rituels collectifs chantés, costumés, dansés. L’histoire en atteste plus près de nous (danse des Corybantes en Grèce, Nataraja dans le boudhisme, danses de Saint-Guy au moyen âge, ...) avec des danses ritualisées à vertu thérapeutique (Schott-Billemann, 2020).
Les pratiques se poursuivent donc aujourd’hui et offre une voie de guérison et d’épanouissement dans les domaines physique, social, émotionnel, mental et spirituel. A Panzi, des femmes en témoignent, retrouvant la voie de la guérison et se réinvestissant dans des projets de vie.
Bibliographie/Sitographie
Garfinkel Y. (2020). Danse sacrée, Danse profane, de la Préhistoire au Moyen-Âge. In Nouvelle histoire de la danse en Occident, De la préhistoire à nos jours. Sous la direction de Laura Cappelle. Éditions du Seuil
Schott-Billmann, F. (2020). Chapitre VIII. Les danses de guérison d’hier et d’aujourd’hui. Dans : F. Schott-Billmann, Thérapie par la danse rythmée: Les bienfaits de la transe (pp. 139-152). Paris: Odile Jacob.
26/11/2023
La Psychophysiologie étudie la relation Corps-Esprit. Le système nerveux, unité fonctionnelle composé du système nerveux central (SNC) et du système nerveux autonome (SNA) est à la base de processus physiologiques et psychologiques. Laissons de côté le système nerveux central et intéressons-nous au système nerveux autonome. En charge de l'homéostasie, il régule l'équilibre interne de manière non volontaire, nous permettant ainsi de nous ajuster à notre environnement.
Nous avons d'une part le système sympathique (SS) ou orthosympathique. Il permet de répondre de manière instinctuelle par la fuite ou le combat, lorsqu'un danger se présente à nous et, de nous adapter à la situation. La peur prédomine à ce moment là. D'autre part, le système parasympathique est composé de deux branches. La branche dorsale (SPD) est activée lorsque les défenses sont dépassées dans une situation de danger intense, présentant une menace vitale. Elle déclenche la réponse de figement, diminuant les fonctions vitales au minimum, dans un instinct de conservation. Il s'agit de "faire le mort". Le système parasympathique ventral (SPV) active, quant à lui, la détente, l'engagement social et la communication, lorsque les conditions de l'environnement deviennent stable et apportent de la sécurité. On observe alors une ouverture du corps avec des sourires, des vocalisations, et une relations aux autres accrues.
Dans le continuum des évènements de la vie, nous passons d'un système à un autre. Dans des conditions sans danger, le système sympathique a un tonus bas. Nous sommes en sécurité, détendus et engagés avec notre environnement, dans l'apaisement et la joie. Si la nouveauté se présente, le tonus du système parasympathique ventral diminue et le système sympathique s'active. Ce sont l'alerte et la peur qui prédominent. Dans un premier temps il y a une évaluation du danger pour déterminer le type de réponse fuite ou combat, puis une réponse motrice jusqu'au moment où le danger disparaît. Nous agissons pour réguler notre interaction avec l'environnement. Si le danger est très intense, il mobilise le système sympathique, qui ne peut sortir du danger. La branche dorsale du système parasympathique s'active alors et amène la réponse de figement. Le degré de dangerosité est évalué comme ingérable pour fuir ou attaquer et c'est l'effroi qui s'empare de nous. Les branches sympathique et parasympathique dorsale fonctionnent en même temps ce qui provoque le figement, appelé aussi dissociation avec une anesthésie physique et psychologique permettant de supporter momentanément l'insupportable. Nous ne pouvons agir face au danger.
Ce mécanisme utile est fonctionnel s'il est limité dans le temps. Une fois le danger passé, le frein parasympathique dorsal est levé et la réponse motrice de fuite ou de combat donne une réponse indifférenciée, c'est-à-dire non orientée vers un danger présent dans l'ici et maintenant. La personne semble attaquer dans le vide libérant ainsi l'énergie accumulée avant le figement. Parfois cette énergie accumulée ne peut de libérer et se retourne vers l'organisme donnant ainsi des manifestations somatiques.
L'étude de ces phénomènes a donné lieu à la "théorie polyvagale" élaborée par Stephen Porges. Elle ouvre la voie de la résolution des traumas. Ceux-ci se manifestent de différentes manières selon le type d'événement vécu, l'âge de la personne au moment de l'événement et la chronicité ou non.
Le tableau ci-dessous donne un aperçu:
Traumas précoces ou sévères Traumas +tardifs ou -sévères
Emprise du SPD Domination du SS
Figement Agitation vaine, explosive
Ralentissement cardiaque, syncope, … Anxiété, attaque de panique, irritabilité,
Pas d’autres possibilités du bébé impulsions difficilement contrôlables
Evitement du contact social
Dissociation
Somatisation
Pb digestifs, asthme, migraines, fatigue chronique,
Fibromyalgie
Lors des accompagnements thérapeutiques, les tableaux ne sont pas aussi nets. Des symptômes des deux types apparaissent en fonction de la sévérité du stress et de l'histoire de la personne. Si l'on prend comme exemple l'alimentation et l'influence du SNA, nous pouvons observer des symptômes liés à une augmentation de l'alimentation (hyperphagie, boulimie) sous influence du système sympathique et à contrario, un arrêt de l'alimentation (anorexie), lié au système parasympathique dorsal. Ce sont des pistes intéressantes à explorer.
Prendre en compte les ressources de la personne, quelles soient internes ou externes et ses capacités d'autorégulation permet d'avancer pas à pas. Mettre la focale sur l'importance des soutiens de l’environnement redonne de la sécurité. Développer une alliance thérapeutique de confiance réactive peu à peu le sentiment de sécurité en activant le système parasympathique ventral. Un travail thérapeutique d'orfèvre, par petites touches ouvre la restauration du lien, la confiance et l'ouverture aux autres
Bibliographie
Schittecatte, M. (2014). Chapitre 18. APPORT DE « LA THÉORIE POLYVAGALE DES ÉMOTIONS » DE S. W. PORGES À LA PSYCHOTHÉRAPIE DES ÉTATS DISSOCIATIFS. Dans : Michelle Vinot-Coubetergues éd., Les fondements des psychothérapies: De Socrate aux neurosciences (pp. 299-313). Paris: Dunod
Gaëlle Delahaie
06.64.76.18.81