Gaëlle DELAHAIE                                 le mouvement enraciné  ©

 

 

Psychologue clinicienne     Gestalt-thérapeute     Formatrice

109 rue du Cluzel,

37000 TOURS

06.64.76.18.81

RDV en présentiel et visio

Polyarthrite rhumatoïde et stress post traumatique

22/05/2025

Polyarthrite rhumatoïde et stress post traumatique

Dans la clientèle en psychothérapie, il n'est pas rare de constater que des personnes ont des maladies associées à de troubles anxieux dépressifs. La polyarthrite rhumatoïde (PR) en fait partie. Il apparaît aussi que ces personnes révèlent des traumatismes vécus pendant l'enfance (maltraitance, négligence). Quels liens pouvons-nous faire entre PR et psycho-traumatisme? Après une description de la symptomatologie, il est évoqué l'implication du système nerveux autonome.

Considérée comme une maladie auto-immune, la polyarthrite rhumatoïde (PR) est évolutive et impacte la vie des patients. Dans le parcours de soin, il est intéressant de prendre également en compte les facteurs psychologiques. Le lien entre la polyarthrite rhumatoïde et les psycho-traumatismes est de plus en plus étudié, notamment dans le cadre des approches biopsychosociales des maladies auto-immunes.  

 

La PR touche entre 0,5 et 1 % de la population adulte. Elle se manifeste au début par une inflammation de la membrane synoviale, puis par un enraidissement douloureux et le gonflement de plusieurs articulations, généralement au niveau des poignets, des mains et des doigts. Cet enraidissement apparaît surtout le matin, celui-ci cède petit à petit au lever. Par la suite, l’évolution prend la forme de poussée, entrecoupées de phases de rémissions. Toutes les articulations peuvent être touchées (coudes, épaules, cou, pieds et orteils, genoux, hanches), qui mènent à la dégradation des os, des tendons et des cartilages. Après plusieurs années, l’évolution de la PR provoque des déformations articulaires et des destructions des tendons. Le recours à la chirurgie orthopédique permet de réparer, avec l’emploi parfois de prothèses.   

Plusieurs facteurs sont présents dans l'apparition de la maladie : des facteurs génétiques (parent atteint de la maladie) et des facteurs environnementaux (tabagisme, pollution atmosphérique, l’obésité, un faible taux de vitamine D et l’utilisation de contraceptifs oraux).  De plus, des études ont mis en évidence le lien entre maladie auto-immune et stress post traumatique. Notamment une étude suédoise qui relève une association marquée (Song H , Fang F , Tomasson G, et al., 2018). 

 

Le stress et l’exposition à des événements stressants uniques ou chroniques provoquent une réaction physiologique, due à l’activation du système nerveux autonome (SNA). Les premiers travaux des chercheurs ont permis de spécifier le lien entre le SNA et les maladies auto-immunes. 

Heinroth, interniste et psychiatre allemand introduit le concept de "somatopsychique", en 1818, et l’applique aux maladies où le facteur corporel modifie l’état psychique. Puis le psychiatre américain Franz Alexander et ses collègues de l’École de Chicago (1952), présentent un modèle où conflits spécifiques et modifications physiologiques apparentes sont liés. Ils déterminent deux types de maladies psychosomatiques : les unes seraient l’expression de tendances hostiles agressives inhibées, et les autres seraient l’expression de la recherche de la dépendance et de la sécurité auprès de figures protectrices (père, mère, adultes tiers, institutions...). On y retrouve notamment l’arthrite rhumatismale. 

Par la suite les travaux d’Hanz Selye a mis en évidence le syndrome d’adaptation au stress et un modèle de réponse somatique aux événements de vie. Il existe une relation entre des réponses psychiques comme la dépression, l’angoisse, des difficultés cognitives, et des réponses somatiques via des circuits neuronaux, notamment l’axe adrénergique ou sympathique, l’axe anté-hypophyse ACTH-glucocorticoïde et l’hormone somatotrope STH-minéralo-corticoïde. D’autres axes, agissant en interrelation sur l’immunité, ont été découverts depuis : le système SAM-sympathique-adrénalo-médullaire, le système HPAC hypothalamo-pituitaire-adrénocorticol et le système EO-endogène opioïde. 

Le schéma simplifié de la réponse à l’agent stresseur (ci-dessous) met en lien l’enchainement de la réponse physiologique. Le stress chronique lié à un traumatisme agit sur l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HSS), et engendre une réaction du système immunitaire particulière (diminution de l'activité des lymphocytes T régulateurs, augmentation des molécules pro-inflammatoires de la famille de cytokines). Cette réaction favorise l’inflammation et le déclenchement de la PR (Katrinli, 2022). 

 

                    Trauma psychologique       

                  (abus, deuil, violence...)   

 

            ↓ 

          Activation de l’axe du stress (HHS)     

          → Cortisol déséquilibré                 

          → Activation sympathique chronique    

  

        

       Perturbation immunitaire         

       → Augmentation des cytokines pro-inflammatoires  

          (IL-6, TNF-α...)       

        → Diminution de l’activité des lymphocytes T régulateurs 

        

           Polyarthrite   rhumatoïde (PR)       

        

   Douleurs + fatigue + invalidité       

         ↓ 

 Retentissement psychologique secondaire     

 (anxiété, dépression, stress chronique)     

 

On voit là l’importance du maintien de l’homéostasie et des systèmes qui y concourt lorsqu’il y a un déséquilibre. Les émotions sont aussi une manifestation des déséquilibres. Antonio Damasio s’est penché sur ce thème et par la suite Stanislas Dehaene souligne l’interrelation entre le biologique et le psychologique. 

Les patients souffrant de PR ayant un antécédent de traumatisme psychologique présentent souvent une perception plus intense de la douleur, une fatigue plus marquée, et une qualité de vie réduite. Le traumatisme module la réponse inflammatoire et pourrait aggraver l’évolution de la maladie. La prise en charge psychologique (psychothérapie, relaxation, gestion émotionnelle, EMDR, thérapies humanistes, comportementales) est à associer au traitement médical classique (Grekhov, 202). La gestion des émotions en agissant sur le stress perçu permet d’augmenter la régulation émotionnelle, grâce au lien thérapeutique et à l’intersubjectivité Des interventions comportementales, comme le yoga et la pleine conscience, sont associées à une diminution de l'inflammation. On voit donc l’importance d’une prise en charge multimodale. Des études sont encore en cours pour comprendre pleinement le mécanisme d'action thérapeutique, l'efficacité et les éventuels effets secondaires des traitements anti-inflammatoires. 

 

 

 

 

Bibliographie/Sitographie 

Polyarthrite rhumatoïde. Une maladie modèle pour la recherche sur l’inflammation chronique  https://www.inserm.fr/dossier/polyarthrite-rhumatoide/ 

Le rôle du système immunitaire dans le trouble de stress post-traumatique Breton S. (2021). Une approche psychosomatique des maladies rhumatismales. Le rhumatologue n°19. 

 

Damasio A., L'erreur de Descartes : La raison des émotions, Paris, Odile Jacob, 1995. Et, Spinoza avait raison. Joie et tristesse, le cerveau des émotions, Paris, Odile Jacob, 2003 

 

Dehaene S., « Vers une science de la vie mentale », Leçon inaugurale présentée le 26 Avril 2006 au Collège de France. 

 

Grekhov RA, Suleimanova GP, Trofimenko AS, Shilova LN. Psychosomatic Features, Compliance and Complementary Therapies in Rheumatoid Arthritis. Curr Rheumatol Rev. 2020;16(3):215-223. 

 

Katrinli, S., Oliveira, NCS, Felger, JC et al. Le rôle du système immunitaire dans le syndrome de stress post-traumatique. Transl Psychiatry 12 , 313 (2022). https://www.nature.com/articles/s41398-022-02094-7 

Piché R. (1993) stress psychologique et immunité cellulaire impact du diagnostic d'une masse suspecte au sein  

 

Song H, Fang F, Tomasson G, et al. Association des troubles liés au stress avec les maladies auto-immunes ultérieures. JAMA. 2018 ; 319(23) : 2388–2400.  https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2685155 

Gaëlle Delahaie

    109 rue du cluzel, 37000 TOURS

06.64.76.18.81